
Reporters d’Espoirs lance une campagne de précommandes pour le 4e numéro de sa revue papier, consacrée à la biodiversité et plus particulièrement à l’Océan. Rendez-vous sur Ulule en cliquant ici pour la découvrir et la commander.
Reporters d’Espoirs lance une campagne de précommandes pour le 4e numéro de sa revue papier, consacrée à la biodiversité et plus particulièrement à l’Océan. Rendez-vous sur Ulule en cliquant ici pour la découvrir et la commander.
Confrères, consoeurs, journalistes : Reporters d’Espoirs et l’agence d’études iligo vous convient à un webinaire mardi 13 mai de 11h à 11h45 pour vous présenter les résultats de leur étude menée avec le soutien de l’OFB – Office Français de la Biodiversité. Quelles sont les pratiques de vos confrères et consœurs ? Que connaissent-ils et pensent-ils du sujet biodiversité ? Quelles difficultés rencontrent-ils ? Quels conseils adressent-ils à la profession ? Nous avons croisé les regards de journalistes et de scientifiques sur la couverture médiatique de la biodiversité. En 45 mn top chrono, nous vous proposons un regard en miroir via les principaux résultats de notre étude. Venez échanger avec nos 3 experts qui partageront des conseils à votre attention, et répondront à vos questions : – Céline Pasquier, Directrice déléguée, coordinatrice de l’étude, iligo – Cyrille Frank, Consultant, spécialiste des contenus et formateur en journalisme – Philippe Grandcolas, Directeur de recherche au CNRS, membre du Comité scientifique du Lab Biodiversité de Reporters d’Espoirs |
RDV en ligne ce mardi 13 mai de 11h à 11h45 pour la présentation de la première action du Lab Biodiversité : l’ÉTUDE REPORTERS D’ESPOIRS-ILIGO “Comment les médias parlent de biodiversité et comment aller plus loin ?” dans un webinaire sur inscription ici (inscrivez-vous pour recevoir le lien de connexion).
Les 16 et 17 mai se tient à La Sucrière à Lyon un événement apporteur de solutions pour agir localement et positivement pour le climat et l’environnement : Ici On Agit, à l’initiative du titre phare de la région, Le Progrès. Reporters d’Espoirs s’y associe en organisant le vendredi 16 mai 2025 de 9h30 à 11h, durant la journée dédiée aux professionnels et aux étudiants, une discussion-débat sur la couverture médiatique de la biodiversité, « le sujet dont tout le monde parle… pour dire qu’on en parle pas suffisamment ! ».
Avec la participation de 40 étudiants de l’ISCPA – l’école de communication et de journalisme de Lyon, de Claire Labaune, responsable relation entreprise et Ingrid Genet, responsable des formations de l’ISCPA.
Ce rendez-vous constitue pour Reporters d’Espoirs la première étape de son « Tour des Reporters d’Espoirs 2025-2027 » dans les régions de France, qui inaugure un nouveau cycle et de nouveaux travaux sur la montée en puissance de la couverture de la science et de la biodiversité dans le journalisme et les médias.
Avec le soutien de l’Office Français de la Biodiversité.
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Le thème de la conférence-débat Reporters d’Espoirs :
La biodiversité, un sujet médiatique ?
Là où le climat s’est imposé en bien des secteurs comme sujet cardinal, un autre demeure tapi dans l’ombre : la biodiversité. Celle dont on parle trop peu, ou seulement pour déplorer qu’on n’en parle guère.
Selon l’Observatoire des Médias sur l’Écologie, elle représentait 1 % du contenu audiovisuel en 2024. Le traitement médiatique de ce sujet renvoie plus largement au bagage scientifique des journalistes : ils ne seraient que 2,4 % à être issus d’une formation scientifique (en 2013) contre 5 fois plus 15 ans plus tôt ! Alors que les crises climatique, sanitaire, de biodiversité, s’entremêlent, auxquelles on peut ajouter le pullulement des « fake news » qui inquiètent la profession journalistique, n’est-il pas temps de réhabiliter l‘état d’esprit -et la formation- scientifique dans la profession, pour la renforcer et la relégitimer ?
Reporters d’Espoirs s’y intéresse et va mobiliser les journalistes sur 3 ans avec son Lab Biodiversité 2025-2027, avec le soutien financier de l’OFB – Office Français de la Biodiversité.
L’association a mené une étude pour interroger les journalistes qu’elle présentera lors de cette session : que connaissent-ils du sujet ? Comment le traitent-ils ? Quels sont les obstacles ? Sont-ils prêts à aller plus loin ?
L‘occasion d’une discussion-débat avec 2 journalistes, 1 scientifique et 1 communicant de la biodiversité, et le public de l’événement dont 40 étudiants en journalisme et communication de l‘ISCPA Lyon.
Pour partager témoignages, exemples de reportages et pratiques journalistiques, recul critique du scientifique, et s’interroger collectivement sur comment faire plus et mieux.
INTERVENANTS
Muriel Florin est journaliste au Progrès, à Lyon. Elle y a animé pendant dix ans une page « Sciences pour tous ». D’abord spécialisée dans les sujets « éducation », elle traite aujourd’hui essentiellement les questions d’environnement. Muriel Florin a aussi publié plusieurs ouvrages, Elle préside le Club de la presse de Lyon et sa région.
Anne-Cécile Bras est journaliste à RFI où elle anime depuis 2009 l’émission environnement C’est pas du vent ! : 50 minutes le mercredi, le jeudi et le vendredi à 14h10 pour décrypter avec des invités et des reportages sur les 5 continents comment l’humanité relève son plus grand défi : apprendre à vivre harmonieusement sur une planète aux ressources limitées.
Thierry Lengagne est un scientifique spécialiste de la biodiversité. Il est chercheur au Laboratoire d’Ecologie des Hydrosystèmes Naturels et Anthropisés (LEHNA) du CNRS à l’Université Lyon 1. Il est également Président de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) pour le territoire de l’Ain.
Arnaud Piel est directeur adjoint de l’Office Français de la Biodiversité (OFB) de la région Auvergne-Rhône-Alpes et référent sur les questions de communication.
Floriane Vidal est la coordinatrice du Lab Reporters d’Espoirs Biodiversité, programme de mobilisation des journalistes et médias sur la science et la biodiversité. Elle a précédemment été responsable de la communication de CNRS Ecologie & Environnement.
Le programme et toutes les infos sur Ici On Agit, Lyon, 16 et 17 mai 2025
Reporters d’Espoirs est heureuse de s’associer aux Assises du journalisme qui après Tours, Bruxelles et Tunis, s’installent à Marseille du 28 au 30 avril 2025, sur le thème : « Quel journalisme en Afrique et en Méditerranée pour demain ? ».
Gilles Vanderpooten, directeur de Reporters d’Espoirs, interviendra sur le sujet « Promote and engage for developing solutions journalism » aux côtés de Rym Benarous, Walid Batrawi, correspondant de SahafaMed et formateur en journalisme de solutions, ou encore Nathania Cahen, directrice de la rédaction du média Marcelle. De 17h à 18h le 29 avril, Palais du Pharo.
Pour découvrir le programme intégral et vous inscrire, c’est ici
Le 3 avril 2025, l’équipe de Reporters d’Espoirs faisait une étape de son Tour auprès des étudiants en Master Audiovisuel, Journalisme et Communication Scientifique de l’Université Paris Cité. L’occasion de rappeler ce qu’est la méthode du journalisme de solutions et d’échanger avec eux sur les problématiques qui se posent quand on parle de sciences dans les médias.
Vous souhaitez que nous intervenions dans votre école de journalisme ou votre rédaction ? Contactez nous !
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A l’occasion de la 8e édition de l’Université de la Terre qui se tiendra les 14 & 15 mars prochains à l’UNESCO, nous avons interviewé Jacques Huybrechts, son fondateur. Présentant les enjeux abordés lors des conférences et tables rondes des deux jours, il revient sur la genèse de ce projet et sur l’importance qu’il accorde à fonder un modèle de société qui respecte le vivant.
Léa Varenne – Jacques Huybrechts, qui êtes-vous ?
Jacques Huybrechts – Je me décris comme un entrepreneur engagé. J’ai toujours mis le projet économique que j’ai porté au service de mes valeurs. C’est notamment pour cette raison que j’ai fondé l’Université de la Terre, qui célèbrera ses 20 ans lors de l’édition des 14 et 15 mars 2025 à Paris. Le Parlement des Jeunes est un autre de mes projets, que j’ai lancé en 2021. Il se tient tous les 2 ans et ressemble à une convention citoyenne de la jeunesse, composée d’un panel représentatif avec lequel nous travaillons sur les principales préoccupations des jeunes.
Qu’est-ce qui vous anime ?
Améliorer la vie de cette planète, à la fois personnellement et collectivement, avec mon équipe et tous ceux que nous embarquons dans nos aventures. C’est peut-être très ambitieux mais j’ai toujours pensé qu’on pouvait associer activité professionnelle et contribution à une meilleure société. Je suis animé par le fait de concilier le projet de mon entreprise et les valeurs auxquelles je crois, qui sont alignées sur les enjeux économiques et humains.
Il y a 20 ans, vous avez décidé de fonder l’Université de la Terre. Quel était votre objectif ?
C’est un projet que j’ai écrit bien avant, en 1992, quand je finissais mes études. A cette date, il y a eu un grand sommet de la terre, le Sommet de Rio, et ça a été pour moi une révélation. A cette époque, je n’étais pas particulièrement engagé sur les sujets écologiques. C’est grâce à ce sommet que j’ai compris combien nous allions dans le mur – et même que nous étions déjà dans le mur sur un certain nombre de critères écologiques. Le GIEC n’avait pas encore déployé son travail sur les questions climatiques, mais il y avait toutes les pollutions que l’on connaît aujourd’hui et je me suis dit : « il faut qu’il y ait une prise de conscience sur ces enjeux-là ». C’est de là qu’est venue l’idée de créer une Université de la Terre, pour en apprendre plus sur ces enjeux, apprendre à vivre différemment et ainsi lutter contre les dégâts causés par les humains depuis des siècles. En 1992, c’était trop tôt, parce que ça intéressait peu de monde à l’époque. J’ai donc laissé le projet dans les cartons et il a fallu deux rencontres pour qu’il voit le jour : une avec l’UNESCO en 2004 – qui cherchait un projet pour 2005 sur les 60 ans des Nations Unies – et une avec le fondateur de Nature & Découverte, François Lemarchand, qui était notre premier partenaire à l’époque. Aujourd’hui, nous en sommes à la 8e édition en 20 ans, mais ça n’a vraiment grandi qu’à partir de 2015, avec la COP 21 pendant laquelle nous avons été intégrés à l’évènement public. Dès lors, les enjeux sont devenus de plus en plus prenants et urgents.
Quel est votre rôle dans tout ça ?
Je suis un peu le chef d’orchestre, en animant le projet dans toutes ses dimensions : financement, programme, mobilisation du public. Il faut aller chercher de nouveaux publics, des néophytes, sur le sujet. Je passe aussi beaucoup de temps sur la partie de communication, puisque nous sommes dans un monde d’information et de communication. Au-delà de l’Université de la Terre, l’idée est de faire monter les sujets dans les différentes sphères sociales.
L’Université de la Terre 2025, Nature = Futur. Pourquoi ce thème ?
On voit bien que c’est une équation qui va être complexe à réaliser. Quand on parle de futur aujourd’hui, on valorise plutôt l’IA, le spatial, la transition numérique, et la nature est relayée à un 2e voire 3e plan. Il faut que le progrès intègre la question de la biodiversité et du vivant au cœur de son modèle dans les années à venir. Ces sujets ont été laissés de côté depuis la révolution industrielle, et nous arrivons au bout d’un modèle qui est prédateur et destructeur pour le vivant. Il devient urgent de réinventer un modèle dans lequel la nature a sa place. Ça ne signifie pas qu’il faut nier le progrès scientifique et technologique, qu’il faudrait opposer l’IA et le vivant. L’IA s’arrêtera peut-être avec la fin des ressources, qui fera que l’ère numérique va ralentir, mais il faut intégrer la nature au plus près de tous ces progrès, en prenant systématiquement le vivant en compte. C’est peut-être impossible de concilier les deux, je suis conscient de la complexité de cette question. Aujourd’hui nous ne pouvons pas dire aux 8 milliards d’êtres humains que nous allons arrêter le progrès scientifique et technologique et tout miser sur l’écologie. Mais ce que nous voulons faire, c’est bâtir un futur qui réintègre le vivant au plus près et au mieux.
Comment choisissez-vous les intervenants à l’Université de la Terre ?
C’est un processus qui prend plusieurs mois. Bien évidemment, les enjeux nous guident, et nous travaillons aussi avec tous nos partenaires et alliés, en interrogeant plusieurs parties prenantes. Je passe beaucoup de temps sur la programmation : je m’informe, je lis, je me nourris de tout ce que j’entends, de tout ce que je vois. J’essaye de voir un maximum de gens pour comprendre ce qu’ils font concrètement et ce qu’ils pourraient apporter. L’objectif est d’équilibrer entre les mondes scientifique, économique et politique. Par exemple, pour cette édition 2025, quelques élus locaux seront là pour illustrer le fait que la soutenabilité peut s’opérer sur le territoire à l’échelle locale.
Parmi les nombreux thèmes abordés, il y a l’économie, la biodiversité et les médias. Ce sont des axes qui méritent d’être regardés de manière transdisciplinaire tant ils sont imbriqués. Comment faire pour qu’ils cohabitent mieux ?
Il faut recréer du lien entre les enjeux. Kate Raworth, grande figure qui sera présente, a inventé la théorie du donut, schéma qui montre les limites planétaires qu’il ne faut pas dépasser, et différents planchers humain et social en dessous desquels il ne faut pas aller. L’idée est de réencastrer l’économie dans la société, la société dans ses limites planétaires, et replacer chaque discipline par rapport à ces enjeux majeurs. C’est la première fois que l’humanité est en capacité de s’auto-détruire. Il ne faut pas oublier que nous sommes une espèce parmi d’autres qui va souffrir considérablement dans les années à venir. On peut choisir de n’en avoir rien à faire, en se disant que toutes les espèces vont disparaître et nous avec. Mais si on prend conscience que le vivant est important, et qu’on a envie de le protéger, je pense qu’il faut essayer de recréer du lien entre tous ces sujets. L’économie doit réintégrer la question du vivant et la question climatique, et les mettre en priorité. Et quand je dis « vivant », je parle aussi de la réconciliation de l’humain avec lui-même, car la dislocation sociale rend incompatible le lien avec toutes les autres formes de vie.
Déjà en 2022, vous disiez que « notre défi collectif est d’ouvrir d’autres voies et un autre chapitre de la civilisation… ». Mais que faire face à la folie du monde qui nous détourne de notre but commun « redevenir terriens » comme vous le dites ?
Faire ce qu’on peut à son échelle, ce qui passe notamment par des changements de consommation. Choisir ce qu’on achète, ça nécessite une éducation, un effort, mais c’est un levier puissant pour changer la société. Le budget est parfois un frein, mais tout le monde peut avoir un impact. Aller dans la nature, comprendre le vivant, mieux le respecter, choisir ses déplacements… sont autant d’actions pour changer les choses. On peut agir par son vote aussi, bien évidement. Nous sommes dans une démocratie, préservons-la. On peut aussi rejoindre des ONG ou encore engager son entreprise dans des démarches de progrès. Il y a aujourd’hui un réseau de collectifs dans les entreprises, de salariés, de collaborateurs, qui essayent de faire bouger les lignes dans leur boîte. Et certains créent même leur propre structure avec une démarche d’impact très clairement annoncée.
Qu’est-ce que vous espérez des tables rondes et intervenant.e.s qui débattent ?
La vocation de l’Université de la Terre peut aussi se résumer ainsi : comprendre pour agir. Ce principe repose sur de l’information, de la précision, et donc un accompagnement de la connaissance pour aller un peu plus loin. Chacune et chacun de nos intervenants ont soit une expérience active sur ces sujets-là, soit des pistes d’actions. On leur demande donc d’être pragmatiques sur les solutions qui sont à disposition des citoyens ou des entreprises.
Qu’est-ce qu’il ressort de concret de l’Université de la Terre ?
D’abord des transformations personnelles. De nombreux participants, dont des patrons de grands groupes, nous ont dit que l’Université de la Terre avait changé leur manière de voir le monde. En 2025, nous lançons également un mouvement pour que les citoyens se reconnectent au vivant et à la nature. Il repose sur trois piliers que sont l’équilibre personnel, physiologique et psychique. On y retrouvera les questions de l’alimentation, du mouvement et aussi la reconnexion à la nature qui est un facteur d’équilibre physique et psychique. Cette opération, baptisée « 1, 2, 3, dehors », a pour vocation de porter un message fort : prendre conscience du vivant, de la nature, de ce qui nous entoure, c’est essentiel à notre bien-être. Ça va prendre du temps de changer les comportements, d’engager les citoyens pour qu’ils aillent vers la nature, mais c’est une opération concrète qui doit aussi amener les citoyens à la protéger grâce à une meilleure connaissance de celle-ci.
Dans son article Sortir de la sidération : 20 actions à mettre en place, Bon Pote suggérait d’« inonder la zone de (non) merde » pour reprendre les termes. Il fait référence à la tactique d’extrême droite qui consiste en « flood the zone with shit », ce que l’on observe sur les réseaux sociaux. Comment cela peut aboutir ?
Je crois qu’il va falloir une forte mobilisation. Pour le moment, nous sommes atones, les forces de progrès social et écologique sont sidérées face à ce qui est en train de se passer. Il n’y a pas de mobilisation alors que de l’autre côté ça se mobilise très fortement. Il faut donc que l’activisme se mette en place. On peut tous être activistes à sa manière. La mobilisation, il y a quelques années, a été très forte sur le climat et là il ne se passe plus rien. Un des thèmes de l’Université de la Terre est la radicalité positive : par exemple, face à la loi agricole, il y a un peu de mobilisation mais elle est trop faible. On est sidérés mais je pense que ça va monter, il va falloir que ça monte. Il y a des échéances importantes électorales en France, au niveau local et national, donc il va falloir monter au front, il faut agir.
Propos recueillis pas Léa Varenne pour Reporters d’Espoirs
Dès notre plus jeune âge, nous nous forgeons avec des narrations qui nous permettent de comprendre le monde adulte, les travers humains, les cultures et les mœurs. Les histoires ne sont pas destinées qu’aux enfants. Des récits religieux, fictions, séries, divertissent aussi les adultes et structurent leurs repères de vie. Quant aux médias d’information, ils contribuent à façonner la vision que les citoyens ont de la société, par la manière dont ils racontent la vie politique et économique. Les rhétoriques sociales, politiques, médiatiques, écologiques actuelles seraient-elles dépassées, et empêcheraient-elles l’émergence de nouveaux imaginaires ? C’est ce que prétendent les défenseurs de « nouveaux récits » qui revendiquent des narrations plus en phase avec leurs aspirations – souvent écologiques ou sociales. Pour tenter de définir cette notion qui fait florès, nous avons interrogé d’une part Antoine Buéno, essayiste et prospectiviste, et d’autre part Jean-François Rochas-Parrot, alias « Jeff » des « ÉcoloHumanistes ». Deux visions, deux récits, qui témoignent de la subjectivité de la notion.
Les « nouveaux récits », de quoi donc peut-il bien s’agir ? Pour Antoine Buéno, essayiste et conseiller au Sénat sur les questions de transition écologique, « le terme peut désigner quelque chose de concret qui est la question de l’imagination dans les projections que l’on peut faire au sujet de l’avenir ». Une discipline existe pour cela : la prospective. « Pour faire de la prospective, il faut des informations concrètes, de la data – ce peut être des rapports, des articles scientifiques-, et aussi de l’imagination car ce qui advient, le réel, est toujours un défi à l’imagination. Vu du passé, le présent ressemble à un récit de science-fiction. Sans imagination et sans prise de risque vis-à-vis de la narration et des scénarios que l’on va élaborer, on a vraiment toutes les chances de ne pas être pertinent en matière d’anticipation et de projection du futur. Il y a donc une véritable importance à créer du récit. »
Pour Jeff des ÉcoloHumanistes – blog de penseurs qui réalisent des infographies et formations (avec Animacoop) pour partager des scénarios qui permettraient de « tendre vers un monde plus épanoui » – : «Il y a des milliers d’histoires. Ce qu’on comprend des gens qui parlent de nouveaux récits, c’est qu’il faut changer notre imaginaire ou du moins changer les valeurs fortes actuellement dominantes. Par exemple, dans l’éducation, c’est la compétition qui est mise en avant, alors que valoriser d’avantage la coopération peut être la base d’un nouveau récit qui permette de penser l’interdépendance plutôt que l’individualisme. »
Un consensus s’esquisse : le terme de nouveaux récits n’a pas de définition claire.
La volonté de parler de « nouveaux » récits, semble s’inscrire dans un courant de modifications quasi-systématiques des concepts, systèmes, fonctionnements. « Nous vivons dans un monde qui est dans une folie, une hystérie de la nouveauté » indique Antoine Buéno. « Vous avez dû remarquer qu’il faut tout changer, en permanence. Les systèmes informatiques en sont une caricature : il faut tout changer et tout revoir même si ça fonctionne très bien ». C’est ainsi que le concept de « récits » se voit, lui aussi, affublé de la caractéristique nouvelle. « J’imagine qu’un récit n’est « nouveau » que si on lui accole l’étiquette « nouveau » mais parmi tout ce qu’on appelle les « nouveaux récits », qu’est ce qui est véritablement nouveau ? Il existe une guerre de l’imagination qui se joue en fonction de ce que nous souhaitons voir advenir demain. Voulons-nous d’une société qui ressemble à celle de La petite maison dans la prairie ou à celle de Star Trek ? Dans les deux cas, on va agir de manière drastiquement différente pour conquérir, coloniser les esprits et les mentalités. Il s’agit d’un enjeu qui est à la fois social, sociologique, psychologique, culturel et in fine politique. Entre La petite maison dans la prairie d’un côté et de l’autre côté Star Trek, je reconnais des oppositions qui ne sont pas nouvelles et que l’on retrouve chez Rousseau et Voltaire. »
Au fond, n’y a t-il pas autant de récits d’un futur possible que d’auteurs, animés par leurs propres convictions aussi subjectives soient-elles ?
Pour Antoine Buéno, il existe un récit qui lui semble le plus adapté face aux problèmes actuels : « celui de la croissance verte, c’est-à-dire un mode de production, un mode d’existence de l’humanité économique qui permette de desserrer notre étau sur la planète et donc d’alléger notre empreinte environnementale. Selon moi, abolir le capitalisme serait la pire des solutions. Le seul récit qui me semble crédible et sur lequel on puisse compter est le récit d’un capitalisme radicalement transformé, d’un capitalisme qui demeure la dynamique de la société. C’est-à-dire maintenir la dynamique de la croissance pour la mettre au service d’un verdissement de l’ensemble de nos activités ». Le récit promu par les ÉcoloHumanistes repose sur deux autres concepts : la robustesse et l’interdépendance. « Le concept de robustesse est inspiré des travaux d’Olivier Hamant, chercheur en biologie à l’INRAE à Lyon, qui postule que les humains sont accros à la performance. Face à cela, la solution serait la robustesse, définie comme la capacité d’un système à rester stable malgré les fluctuations extérieures. La performance est ici considérée comme le récit dominant, et la robustesse le nouveau récit, selon Jeff. Je trouve qu’avec ce terme, il est plus facile de parler de thématiques écologiques à certains publics, notamment les populations les plus favorisées et éduquées. Alors qu’avec un récit comme celui de la décroissance, on perd vite tout le monde. »
Le rôle des médias et des journalistes dans le façonnement des représentations du présent, et d’un futur possible, est primordial. Jeff conçoit que « on ne peut pas créer un nouveau récit de toute pièce : c’est un engouement, et c’est un espace médiatique qui le relaie, le diffuse, les journalistes y participent beaucoup, à travers ce que nous voyons à la télé, dans les articles… » . Pour Antoine Buéno, « les médias ont à l’évidence un rôle dans la prédominance d’un imaginaire ou d’un autre. » Le journalisme, défini par Antoine Buéno comme « une matière molle, une matière mouvante qui s’adapte à son temps, à ses besoins », a pour vocation d’emporter la confiance que les gens accordent aux médias,« face à un monde qui est de plus en plus clivé par les réseaux sociaux, les algorithmes, les smartphones [et] potentiellement réinventer le journalisme pour essayer de contrer la défiance. » Les formes de journalisme telles que le journalisme de solutions, ou encore le slow journalism et le journalisme d’investigation sont autant de représentations de la réalité qui permettent de donner à voir une facette complémentaire du monde et de la société. « Aujourd’hui, la majorité des médias français militent en faveur de l’imaginaire de la décroissance, il y a là un parti pris médiatique parce qu’il y a une dominante de gauche qui s’exprime » estime Antoine Buéno.
Alors qu’il existe autant de récits que d’orientations politiques et sociales, le rôle du journalisme, par sa capacité à raconter une époque et livrer des faits de manière dépassionnée, serait-il la base de l’esquisse d’un imaginaire commun ?
Propos recueillis par Léa Varenne pour Reporters d’Espoirs
Crédits photographiques : Christophe Hautier pour Unsplash
A l’occasion de la nouvelle l’étape du Tour des Reporters d’Espoirs à Bordeaux, Gilles Vanderpooten interviendra jeudi 21 novembre devant les étudiants en Master I de l’IJBA – Institut de Journalisme Bordeaux-Aquitaine, à l’invitation d’Arnaud Schwartz, directeur de l’école.
L’opportunité d’échanger avec les étudiants sur leurs aspirations et sur l’apport du journalisme de solutions, à l’occasion des 20 ans de la démarche et de l’association.
« 13 à 43 % : c’est la part du climato-scepticisme dans les pays de l’OCDE1 ». Ce constat préoccupant a poussé l’association Quota Climat à initier l’Observatoire des Médias sur l’Écologie. Le consortium d’associations et d’institutions porteuses de cette plateforme en ligne a pour cheval de bataille de « faire entrer l’urgence écologique dans l’agenda médiatique ». Lancé le 7 novembre 2024, cet outil produit des données accessibles à tous sur la couverture médiatique des crises environnementales et écologiques. Alors que la COP29 sur le climat vient de prendre fin à Bakou (Azerbaïdjan), Eva Morel, cofondatrice de l’association Quota Climat, nous a partagé les ambitions de l’Observatoire et son évaluation de la place des solutions dans les médias.
Pourquoi nous avons choisi ce sujet ? Reporters d’Espoirs a réalisé en 2020 une étude sur le traitement médiatique du climat. A l’époque, un tel outil n’existait pas : nous devions lire, visionner, écouter plusieurs milliers de sujets, « humainement ». L’OME va permettre d’automatiser en grande partie cela et libérer du temps pour l’analyse des données. Dans la lignée de notre Lab MédiasClimat, Reporters d’Espoirs va lancer un nouveau Lab thématique en 2025 et s’appuyer pour une partie de ses études sur l’outil utile et intéressant que représente l’OMÉ et auquel nous allons nous associer. A bientôt pour vous en dire plus ! |
Léa Varenne – L’Observatoire des médias sur l’écologie : de quoi s’agit-il ?
Eva Morel – L’OMÉ est issu du travail collaboratif de 4 associations – Quota Climat, Climat médias, Expertise Climat et Data For Good –, 2 entreprises – Média Tree et Eleven Stratégie – et le soutien de deux partenaires institutionnels – l’Agence de la transition écologique (Ademe) et l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom). Il a pour objectif de produire une donnée fiable, objective et la plus unique possible pour évaluer la quantité et la qualité des informations environnementales dans les médias. Nous avions pour ambition de rendre le résultat en open source et accès libre afin que tout le monde puisse le consulter à tout moment, que les médias puissent s’en servir pour améliorer leurs performances en continu, que les pouvoirs publics puissent utiliser des données dans le suivi de leurs politiques publiques – et éventuellement refondre certains dispositifs à la lumière de la disponibilité de cette donnée – et que les citoyens puissent se mobiliser pour faire pression sur les médias et les inciter à mieux et davantage en parler.
Quelle est votre ambition quant à l’utilisation de cet outil par les médias ?
Dès la conception de l’outil, nous avons tenu à embarquer les médias dans son utilisation et surtout la compréhension de ce que nous faisions. Nous avons procédé en 2 étapes : une réunion de présentation à mi-parcours pour qu’ils comprennent la méthodologie et prennent connaissance de l’initiative, puis des rendez-vous individuels avec ceux qui le souhaitaient pour présenter plus en détail la méthodologie. L’objectif est qu’ils acceptent l’existence de l’outil et qu’à partir du moment où ils la reconnaissent officiellement, ils puissent s’en servir pour piloter leurs performances sur ces sujets.
Les données de l’observatoire peuvent aussi être mobilisées pour interpeller les médias sur l’évolution de leur traitement de ces thématiques. Quota Climat le fait régulièrement, et récemment, Vert a publié un classement des médias qui parlent d’écologie. Une preuve parmi d’autres que les acteurs du domaine se sont approprié l’outil.
A terme, l’idée est aussi de faire en sorte que les données s’uniformisent avec celles produites par les équipes data des différents médias. Aujourd’hui, dans le cadre des contrats d’objectifs et de moyens, ces derniers envoient à l’ARCOM un reporting annuel. Mais pour que les analyses soient facilitées, il est nécessaire que les données des médias et celles de l’ARCOM soient similaires, ce qui n’est pas toujours le cas. C’est pourquoi nous aimerions que les directions de rédaction et directions des médias s’emparent des analyses produites par l’observatoire : cette plateforme leur permet d’aller très finement en granularité dans la compréhension de ce que fait leur média, en plus des options de comparaison, pouvant servir, à terme, d’outil de monitoring.
La COP 29 s’est tenue du 11 au 22 novembre à Bakou, en Azerbaïdjan. Pendant cette période, avez-vous noté une progression dans la mise en lumière d’initiatives, de solutions sur le climat dans les programmes d’information ?
Ce mois-ci, nous avons remarqué une hausse du temps d’antenne global sur les questions de l’écologie. Chaque année, il y a deux grands moments médiatiques pour ces sujets : la COP et l’été (si on met de côté les évènements météorologiques extrêmes). 2024 fait exception du fait de la crise agricole pour laquelle le lien a été fait avec les questions environnementales. Cela a généré un pic d’informations sur le sujet, plutôt très négatif. Pour autant, on note une hausse de la mise en avant de solutions, certes timide mais nette, et c’est encourageant pour nous : cela signifie que l’on ne parle pas des COP uniquement sous le prisme du défaitisme ou du simple constat, mais aussi de la manière dont on pourrait adresser le problème. C’est davantage un signal faible qu’une vraie tendance observée sur les courbes de l’OMÉ, mais c’est très encourageant.
Comment en êtes-vous venus à évaluer le traitement médiatique des solutions face aux crises environnementales ?
Pour nous, c’était indispensable de savoir dans quelles mesures les médias parlent des causes, conséquences, constats et solutions, car nous savons que la mise en action des différents maillons de la société se fait en ayant conscience des initiatives qui existent. C’est en diffusant des solutions de manière répétée que le message imprègne. A ce sujet, l’OMÉ met en lumière deux pratiques à faire évoluer : d’une part, ce sont avant tout les conséquences et le constat qui sont traités dans les médias. D’autre part, quand on parle de solutions, certaines thématiques sont oubliées, comme le bâtiment par exemple, qui est pourtant un levier important de transition. Grâce à l’observatoire, en prenant conscience de la carence d’information sur un sujet, les médias peuvent décider de produire un contenu original pour faire avancer la société.
Vous travaillez sur une proposition de loi pour un meilleur traitement médiatique des questions climatiques. Comment cela s’illustrerait ?
Un meilleur traitement médiatique est un traitement qui ne désinforme pas et qui parle de manière transverse des questions d’écologie. Par là, j’entends qu’il ne doit pas être abordé uniquement dans des rubriques spécialisées, mais en faisant des liens avec d’autres thématiques qui sont intrinsèquement liées à l’évolution du climat, de la biodiversité et de l’état des ressources. Je pense par exemple aux domaines de la santé, de la géopolitique, de l’éducation ou encore de l’économie. Diffuser la question de l’écologie au sein de l’ensemble des rubriques met en lumière les liens qui existent entre toutes ces problématiques, Ce rapprochement est encore très souvent taxé d’être militant, déconnecté ou non adapté à l’angle principal du sujet, alors qu’il s’agit là d’un élément de compréhension indispensable à la prise de conscience de l’urgence environnementale.
C’est pourquoi dans la proposition de loi, nous soumettons entre autres deux axes clés concernant l’ARCOM : premièrement, la doter de compétences plus affûtées pour favoriser l’information environnementale dans les médias, et notamment sa qualité. Deuxièmement, nous voulons lui conférer la compétence d’instaurer un quota en période électorale, si elle le souhaite, pour parler davantage d’environnement. On constate que c’est le grand oublié, avec des enjeux chauds qui prennent le dessus, prédéterminés par des acteurs politiques. Nous suggérons aussi que l’Observatoire des Médias sur l’Écologie soit inscrit dans la loi pour que l’outil soit pérennisé au-delà de nos efforts associatifs. Enfin, nous parlons de la question de la publicité, qui doit être prise en compte dans la cohérence éditoriale. L’objectif est que la présence potentielle de greenwashing ou de nombreuses publicités défavorables à l’environnement puisse être progressivement encadrée et amenuisée.
Quel impact espérez-vous dans les médias grâce à cette loi ?
On constate aujourd’hui qu’un certain nombre de médias sont mieux-disant, avec une envie d’améliorer la qualité des contenus. Mais ce n’est pas le cas pour tous : certains font preuve de plus en plus d’opposition idéologique aux notions d’écologie, même vis-à-vis de la science du climat, ce qui est très préoccupant. L’idée est donc de rehausser le standard pour qu’il y ait un socle minimum de qualité informationnelle qui transcende ces clivages éditoriaux et partisans, quel que soit le média consommé. Tout cela part d’un constat : les médias ont la capacité d’informer des bulles d’audience pouvant être soumises à une information insuffisante, de mauvaise qualité voire à de la désinformation. Et ces pratiques ont un effet délétère sur la capacité du public à se former une opinion éclairée et à agir vis-à-vis du climat.
Le positionnement de Quota Climat et de l’observatoire n’est pas le même,. Entre la neutralité requise par l’outil qu’est l’OMÉ et l’activisme lié à vos activités d’association, où placez-vous le curseur ?
Pour nous c’est très simple : les données de l’observatoire sont produites avec la méthodologie la plus expertisée possible. Pour cela, nous nous entourons d’institutions, d’experts et d’autres structures qui n’ont pas forcément les mêmes intérêts que nous. Par contre, dans la manière de communiquer sur ces données, on se donne la possibilité d’avoir une liberté de parole. Ainsi, quand nous interpellons tel ou tel média, nous utilisons ces données expertisées dans un cadre qui peut être plus provocateur ou militant.
Propos recueillis par Léa Varenne/Reporters d’Espoirs
Pour découvrir l’Observatoire des Médias sur l’Écologie : https://observatoiremediaecologie.fr/
1 https://www.quotaclimat.org/
Lien utile :
https://vert.eco/archive/edition-speciale-chaleurs-actuelles
A l’occasion des Tribunes de la Presse, événement phare organisé par la Région Nouvelle Aquitaine pour la 14e année (dont vous trouverez le programme ici), Reporters d’Espoirs vous donne rendez-vous à Bordeaux.
Au programme :
Mercredi 20 : Soirée d’ouverture des Tribunes de la presse au Théâtre national Bordeaux Aquitaine.
Jeudi 21 : intervention devant les étudiants de l’IJBA – Institut de journalisme Bordeaux Aquitaine.
Vendredi 22 : rencontres avec journalistes et médias de Bordeaux.
Samedi 23 : remise du Prix Reporters d’Espoirs Sport & Innovation sociale en présence de :