400 habitants à l’année, plus de 6000 festivaliers le temps d’un week-end : depuis 2018, juillet venu, le charmant village de Couthures-sur-Garonne se mobilise trois jours durant pour accueillir le Festival international de journalisme parrainé par le groupe Le Monde. Ce rendez-vous unique en son genre réunit professionnels des médias et grand public pour débattre de l’actualité sous le soleil estival. Partenaire de cette 6e édition, Reporters d’Espoirs était présent pour parler traitement médiatique du climat, créativité des médias et bien sûr, journalisme de solutions.
A notre arrivée, samedi 16 juillet au matin, la chaleur est déjà étouffante : le thermomètre affiche 33°C, et grimpera jusqu’à 42°C le lendemain. Combiné à l’extrême sérieux des thématiques du festival, actualité oblige -frontières, concentration des médias, propagande…-, on pourrait penser l’atmosphère plombante. Il n’en est rien : elle est bon enfant, les festivaliers ont le sourire aux lèvres, et le sentiment d’une véritable communauté où tout le monde aime à se retrouver s’installe au fur et à mesure. Au détour d’une rue, d’une conférence ou même à table, on croise la marraine du festival Charline Vanhoenacker, l’écrivain et interprète Gaël Faye, le propriétaire de L’Express Alain Weill, ou encore Edwy Plenel et Salomé Saqué, heureux d’échanger quelques mots.
Ateliers climat et journalisme de solutions
Au vu de la météo, notre premier atelier tombe à pic : il porte sur le traitement médiatique du climat, et comment l’améliorer. Car selon l’étude MédiasClimat menée par Reporters d’Espoirs en 2019, tout supports confondus, seul 1% des sujets en moyenne faisaient alors référence au climat, le plus souvent sur un ton catastrophiste. Mais pourquoi est-ce donc si difficile d’aborder ce thème pour les journalistes ?
Parmi la cinquantaine de festivaliers ayant répondu présent, les idées fusent : manque de culture scientifique, complexité et nature anxiogène du sujet, économie des médias… La discussion se déplace ensuite sur les réponses à apporter : unanimement, les festivaliers réclament plus de formations pour les journalistes et suggèrent des rencontres sur le terrain avec victimes du dérèglement climatique et acteurs luttant contre. Le public aborde ainsi l’importance d’un traitement plus constructif, mettant également en avant des initiatives inspirantes et reproductibles pour assurer la transition écologique.
Nous revenons le lendemain sur la thématique, à travers un atelier participatif dédié au cœur du sujet de Reporters d’Espoirs : le journalisme de solutions. Malgré l’heure matinale (le concert du DJ la veille a duré jusqu’à 2h du matin), quelques visages familiers et beaucoup de nouveaux sont (re)venus au « Verger », l’espace en plein air qui nous est dédié, au milieu des arbres fruitiers. Visiblement, le bouche à oreille fonctionne. L’exercice du jour consiste à classer trois articles dans l’ordre du moins au plus « porteur de solutions ». Pas évident : juge-t-on la solution elle-même ou plutôt son traitement journalistique ? Faut-il privilégier une initiative collective ou individuelle, une réponse à un problème précis ou global ? Et comment différencier résilience et solution ? Ensemble, nous abordons ainsi la méthodologie du journalisme de solutions, ses avantages ainsi que ses limites.
La créativité des journalistes en débat… et récompensée !
Dimanche après-midi. Après une courte pause récréative, vient le moment de notre conférence sur la créativité. Une heure durant, nos intervenants Julien Blanc-Gras (écrivain-voyageur), Esther Meunier (journaliste à NOWU) et Lorraine Rossignol (journaliste à Télérama) discutent d’innovations éditoriales et techniques, en compagnie d’Augustin Perraud, notre Reporters d’Espoirs animateur du jour. Les questions fusent dans le public : pour encourager la créativité, ne faudrait-il pas déjà rendre la profession plus ouverte, les promotions d’école de journalisme plus diverses ? Le journalisme de solutions n’est-il pas déjà une innovation sur le fond en soi ? La créativité, une réponse pour attirer de nouvelles audiences ? Nos intervenants puisent dans leurs différentes expériences, électron libre, pigiste, journaliste dans une rédaction traditionnelle ou d’un genre nouveau, formés en école de journalisme ou pas.
Clou du spectacle : la conférence tient lieu de remise du Prix de la Créativité Reporters d’Espoirs 2022, décerné au jeune média NOWU créé par l’alliance de France Télévisions et le service public allemand WDR. Lancé en 2019, NOWU s’adresse d’abord aux 15-24 ans avec une forte présence sur Instagram et Tiktok, un ton direct et décalé (tutoiement et références à la pop culture sont de mise) ainsi que sa spécialisation sur un thème qui préoccupe un nombre croissant de jeunes : l’environnement. Le tout sur un ton constructif, livrant des pistes d’action collective et individuelle, comme nous l’explique Esther Meunier, journaliste à NOWU.
Ambiance baignade et musique
Une fois notre dernière intervention passée, il nous reste encore quelques heures pour pleinement profiter des autres ateliers, conférences et rencontres proposées par le festival – et bien sûr, au passage, poser quelques questions sur la pratique du journalisme de solutions aux divers intervenants ! La journée se termine en maillot et en musique, avec la tant attendue baignade dans la Garonne et un concert folklorique du groupe bordelais Timeless Trio à la nuit tombée. Ainsi s’achève un week-end chaleureux, à la fois par sa météo, son actualité et surtout, une formidable ambiance.
Par Morgane Anneix