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« La seule vérité qui vaille, c’est celle du terrain » – Christine Buhagiar, directrice régionale Europe à l’AFP et membre du jury du Prix européen du jeune reporter

By 5 février 2024février 19th, 2024No Comments

Christine Buhagiar est la directrice régionale Europe de l’Agence France-Presse (AFP). Passée précédemment par les services France, politique, économique, puis vidéo de l’AFP, elle a rejoint cette année le jury du Prix européen du jeune reporter d’espoirs. Elle évoque pour nous son expérience journalistique et son activité au sein de l’AFP.



En quoi consiste votre mission en tant que dirigeante Europe à l’AFP ?

Je m’assure que notre couverture européenne hors-France fonctionne bien, que les budgets alloués sont correctement gérés, et que notre portefeuille de clients reste suffisamment important pour que notre action ait du sens. L’essence de notre travail est d’être repris par les médias français et étrangers, ce qui nécessite de convaincre nos clients pour qu’ils continuent de nous solliciter. Couvrir l’Europe coûte cher, d’autant que nous travaillons en plusieurs langues.

J’ai pour mission d’harmoniser toutes ces dimensions au niveau européen, pour assurer une couverture rapide et de qualité – notamment actuellement des conflits en Ukraine et au Haut-Karabakh. C’est une tâche de moins en moins aisée au vu des défis diplomatiques et économiques auxquels l’Europe fait face.

Vous qui avez dirigé le développement de la vidéo à l’AFP, qu’est-ce qu’un bon reportage vidéo ?

Il faut d’abord être sur le terrain. Et bien choisir ce terrain, pour être en mesure de le comprendre et de raconter la seule vérité qui vaille : celle que l’on découvre sur place. Un reportage vidéo dit les choses, il les met dans un contexte en tentant d’allier la qualité de l’image à la profondeur du texte, sans les doublonner. Les images ont un langage qu’il s’agit de respecter, et le texte permet d’amener du contexte. L’AFP était donc particulièrement bien placée pour créer ce service puisqu’elle pratiquait déjà ces deux dimensions.

Quel intérêt trouvez-vous à faire partie d’un jury comme celui de notre Prix européen du jeune reporter ?

Il est toujours intéressant de regarder ce que les plus jeunes font, et d’encourager les talents. Un jeune journaliste se développe sur le terrain et avec les conseils de journalistes expérimentés. Il faut savoir transmettre notre vision forgée par des décennies de pratique, tout en leur donnant l’opportunité d’apporter leur nouvelle perspective. C’est enrichissant à la fois pour les jeunes et pour les plus âgés. Il m’est d’ailleurs arrivé d’engager des candidats après les avoir rencontrés lors de Prix !

Quelle évolution observez-vous dans le traitement des sujets européens ?

A l’AFP nous essayons d’avoir une vision de plus en plus pan-européenne, car les problématiques ne sont jamais uniquement nationales : la crise climatique, la guerre en Ukraine, la Covid, l’immigration, la désinformation… Le but est de développer des visions plus européanisées aptes à dépasser le cadre national. C’est ce que nous faisons en data journalisme en recueillant des données dans plusieurs pays sur la base d’un critère spécifique. Prenons par exemple l’aide européenne militaire à l’Ukraine : nous avons cherché des marqueurs qui nous permettaient de mesurer l’effort de chaque pays, par rapport à son PIB, sur tel ou tel type d’aide.

Dans les reportages que vous chapeautez, la dimension « solutions » est-elle présente ?

Bien sûr. Nous nous attachons à montrer la mobilisation extraordinaire de populations pour améliorer leurs situations. Je pense aux Ukrainiens qui poursuivent l’éducation de leurs enfants dans des conditions compliquées, aux Kényans qui créent des applications pour faciliter leur quotidien. Nous cherchons par ailleurs constamment à développer ce journalisme de solutions, notamment à travers nos magazines multimédias combinant texte, photos et vidéos. Sans cette dimension constructive, les médias ne seraient plus que des porteurs de mauvaises nouvelles et on voit que c’est assez mal vécu par les audiences.


Propos recueillis par Paul Chambellant pour Reporters d’Espoirs

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