Mordus de la ville durable ? Ce 36ème « Alter Mardis : Parlons Solutions » consacré aux circuits courts était fait pour vous ! Sous le chapiteau de la Ferme du Buisson en Seine-et-Marne, le débat en lui-même illustrait un circuit de proximité d’idées. Le rapprochement géographique des producteurs et des consommateurs, les nouvelles formes de cohésion villes-campagnes : un caprice de bobo en mal d’authenticité ? Bien plus que ça ! Les préoccupations liées aux bouleversements climatiques, la quête de produits du terroir, la revalorisation des paysages, le consommer juste et mieux, sont autant de comportements qui nous chatouillent et qui matérialisent une prise de conscience écologique et une crise de confiance économique. Et si les circuits courts étaient la solution aux maux de notre société sur-consommatrice? Animée par le journaliste Eric Larpin, cette table ronde qui a réuni Grégory Gendre, Fellow Ashoka et fondateur de Roule ma frite 17, Thierry Vincent, Responsable du développement de l’Arene Île-de-France et Sylvain Péchoux, chargé de mission pour l’AMAP Île-de-France, a fait toute la lumière sur ce pilier du développement durable.
Le compteur kilométrique de nos productions, consommations et déplacements quotidiens, explose. Face à ce gaspillage énergétique, les circuits courts s’imposent comme une alternative des plus sérieuses. Un rapprochement géographique entre producteurs et consommateurs, ainsi qu’une restriction des intermédiaires, qui connaît des retombées positives. Il permet de réduire la consommation d’énergie et l’empreinte écologique, de favoriser l’emploi et les activités locales, de restaurer le lien social, d’assurer une meilleure traçabilité des produits, et de développer la souveraineté alimentaire, énergétique et industrielle.
Si certains sombrent passivement dans un catastrophisme écologique et économique, d’autres portent des solutions innovantes en s’appuyant sur ces circuits courts. C’est le cas de Sylvain Péchoux. Avec le réseau de l’Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne (AMPAP), il crée en Ile-de-France un partenariat de proximité et de longue durée entre des agriculteurs et des groupes de consommateurs. Mais une AMPAP ne se limite pas à un panier. Les uns obtiennent une meilleure rémunération et une reconnaissance de leur travail, en rompant le lien avec la grande distribution ou les intermédiaires. Les autres retrouvent le goût et la qualité du terroir dans leurs assiettes, tout en reconsidérant les réalités de la production agricole. L’association ne s’arrête pas en si bon chemin. Elle propose des formations aux métiers agricoles, un accès solidaire au foncier et un travail d’éveil de vocations au cœur des lycées agricoles. Elle dispose également d’une couveuse d’activités sur une période de 1 à 3 ans, avec l’accompagnement et la mise en situation réelle des personnes en test de création d’entreprises. Ce système viable et équitable connaît un franc succès : « La demande est très forte. Les producteurs d’Ile-de-France sont tellement sollicités par les consommateurs de leurs villages qu’ils n’ont plus assez de paniers pour les Parisiens ! », avoue Sylvain Péchoux.
Même la gestion de nos déchets peut revêtir une notion de proximité. C’est le pari relevé par Grégory Gendre. Son association « Roule ma Frite » valorise localement les déchets d’un territoire. Sur une île marquée par le tourisme et la pêche, passant de 30 000 habitants l’hiver à 300 000 l’été, ce jeune entrepreneur social oléronais a eu l’idée de récupérer l’huile utilisée par les restaurateurs locaux, de la filtrer et de la transformer en biocarburant. Fort de cette expérience pilote de collecte et de recyclage de proximité, il a su mettre en place un modèle reproductible aux autres déchets et adaptable aux spécificités locales d’un territoire, comme la graisse de canard en Dordogne. Former et fédérer les acteurs sur d’autres territoires devient son principal enjeu.
Il ne reste plus qu’à inventer la ville durable! L’Arene Île-de-France en fait l’expérience depuis le mois de janvier. En partenariat avec la ville de Fontainebleau, l’agence a lancé une étude de définition d’une stratégie de ville post carbone. Elle anticipe le changement climatique et la limite des ressources en proposant de nouvelles formes d’habitation, de déplacement, de consommation, d’occupation de loisirs, de communication. La géothermie et la forêt sont notamment envisagées comme alternatives énergétiques. Toutes les ressources et possibilités du territoire sont envisagées. « 85% de l’Ile-de-France est composé d’espaces naturels, alors que l’urbain se coupe de ce monde. Il ne sait même plus comment un produit est produit ! » s’impatiente Thierry Vincent.
Si la confiance liée à la proximité demeure un gage de succès, une mobilisation citoyenne conséquente est impérative pour que le changement s’opère. Longue vie aux circuits courts !