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La Croix

Comment faire des journalistes des médiateurs du débat, des artisans du dialogue, pour ne pas sombrer dans une culture de la polémique nourrissant division et ressentiment ?

By Biais de négativité, Home, Le LabNo Comments

Reporters d’Espoirs a réuni en octobre 2023 une sémiologue, Mariette Darrigrand, la productrice d’une émission de de télévision offrant des débats approfondis, Nathalie Darrigrand (C ce soir, 90 minutes quotidiennes de débats sur France 5), l’enseignant et ex-rédacteur en chef d’un journal réputé pour la qualité de ses débats, François Ernenwein (La Croix), le rédacteur en chef d’une revue qui prend le temps de raconter les passions françaises, François Vey (Zadig), et un étudiant ayant réalisé son mémoire sur le journalisme de solutions, Antoine de Seigneurens. Pour les faire plancher sur la question suivante : Comment faire des journalistes des médiateurs du débat, des artisans du dialogue, plutôt que de la polémique nourrissant les divisions et ressentiments ? Comment faire que les médias progressent ainsi dans leur fonction de rassemblement, de pacification, de compréhension mutuelle, pour être pleinement utiles à la société, à la coexistence, alors que la division et le communautarisme sévissent, et que les opinions continuent de prédominer sur le réel ?

 

Le constat : la violence à la Une

Rédacteur en chef de Zadig, François Vey part de l’expérience de cette revue trimestrielle qui propose un contenu « constructif » et creuse dans la vie des territoires à travers des reportages inédits. Face à une concurrence davantage axée sur la confrontation, qui génère davantage de recettes, la revue Zadig se retrouve, dans les piles des marchands de journaux, distancée par des titres polémiques comme la revue trimestrielle Front Populaire de Michel Onfray.

Mettre en scène, raconter ou amener le dialogue peut-il dans ce contexte être économiquement attractif pour les médias et entreprises de presse ? A qui et comment s’adresser pour opérer un changement de paradigme sur ce sujet – étudiants et journalistes, dirigeants de médias, citoyens ? Si le journaliste doit devenir médiateur, sur quelles méthodes et bonnes pratiques peut-il s’appuyer ?

 

Le rôle du journaliste : narrateur, médiateur ou cartographe ?

Ancien rédacteur en chef à La Croix, François Ernenwein a enseigné durant de nombreuses années les techniques d’écriture à des étudiants d’écoles de journalisme. L’intégration du récit dans le travail du journaliste lui a permis de sortir de la position de surplomb -parfois reprochée aux journalistes-, et de s’intéresser plus en profondeur aux discours des citoyens et aux débats qui les animent. L’empathie au centre du récit est, pour lui, un élément primordial pour une meilleure prise en compte de « l’épaisseur des choses ».

Les contenus médiatiques ne sont que l’image de faits sociaux et anthropologiques intrinsèques aux sociétés humaines, comme la polarisation ou la catharsis. Mais le journaliste peut « trouver des ruses » pour encourager le débat constructif et amener du dialogue dans des espaces conflictuels. Selon François Ernenwein, il existe une demande sociale en ce sens. Il semblerait néanmoins que, dans les écoles de journalisme, on ne s’intéresse que peu à cette vision du journaliste comme « pacificateur », ou « médiateur ». Pourtant le journaliste pourrait avoir un rapport au terrain différent et un nouveau rôle « d’ambassadeur de la paix sociale », soutient Mariette Darrigrand.

Consultant stratégie chez Prophil et étudiant journaliste au Celsa, Antoine de Seigneurens cite l’exemple de #MeToo pour démontrer que le journaliste sait faire circuler l’information et propulser des débats sociétaux sur le devant de la scène. Selon lui, la possible transformation de la fonction de community manager, assurée par de nombreux journalistes et étudiants, en community-médiateur pourrait offrir des opportunités intéressantes en termes de rapport aux citoyens-utilisateurs et de médiation numérique.

Plutôt que de représenter une figure de médiateur, François Vey pense qu’il est nécessaire de se pencher sur le constat, le réel : le journaliste doit travailler sur les données et partager des diagnostics pour obtenir une vue d’ensemble d’un sujet complexe. La polarisation va en effet de pair avec la méconnaissance des enjeux, l’affrontement se base sur des savoirs et des connaissances plus ou moins établis. Pour que le journaliste œuvre à « mettre d’accord » les gens sur des sujets complexes, il faut selon François Vey avant tout qu’il leur offre un recul nécessaire, et qu’il les aide à confronter le réel aux opinions. Or actuellement, en matière de journalisme politique par exemple, la fonction de déconstruction du discours se perd, et le storytelling semble l’emporter. Sur les plateaux TV, après les discours du Président, les intervenants et journalistes paraphrasent ses propos et, par manque de temps, ne proposent que très peu d’analyse critique.

Des « bonnes pratiques » dans le paysage audiovisuel Français

Nathalie Darrigrand évoque l’émission « Voyage en territoires opposés »que produit sa société Together média etqui est lancée à l’automne 2023 sur France 5 animée par le journaliste Karim Rissouli. Sur quelques jours, on envoie sur le terrain intellectuels ou représentants d’une élite scientifique ou médiatique, pour rencontrer des personnes qui ont des vues totalement opposées à la leur. Le premier épisode, sur le thème de l’écologie, voit François Gemenne (membre du GIEC) aller à la rencontre du collectif écologiste et contestataire « Les Soulèvements de la Terre » ; Camille Etienne (militante écologiste) se rendre sur le circuit Paul Ricard à la rencontre de fans de course automobile ; et Antoine Buéno qui défend une « croissance durable » échanger avec un collectif « pro-décroissance » en Bretagne. Résultats : les discours sont engagés et plutôt construits ; et même si personne ne change d’avis, une réelle prise de conscience de la complexité des sujets et des difficultés des « gens normaux » se produit. On peine toutefois à trouver un dénominateur commun : par exemple l’activiste écologiste se trouve en difficulté d’argumentation face à des personnes qui affirment que la voiture est leur passion vitale.

D’autres initiatives s’en approchant sont mentionnées :

  • Les initiatives de quotidiens locaux comme Nice Matin qui laisse parfois les lecteurs choisir les sujets à traiter par les journalistes, et travaille sur des sujets polarisants comme par exemple la relation conflictuelle de l’homme et du loup dans les alpages français et italiens.  Ou La Nouvelle République, qui propose des pages « Dialogue ».
  • La série documentaire australienne « Go Back to Where You Came From » (2011-2018, SBS) proposait à 6 participants ayant des positions anti-immigration de refaire la route des migrants.
  • Les initiatives visant à remettre au goût du jour les joutes oratoires et disputes médiévales, par exemple dans les écoles.
  • L’émission Crossing Divides a été conçue par Emily Kasriel suivant l’idée que la BBC, par l’ampleur de son réseau de correspondants, était en mesure d’aller chercher des solutions aux conflits à travers le monde. Elle donne à voir, à San Francisco, des journalistes partageant un repas avec des Chinois qui soutiennent Trump et d’autres qui s’opposent radicalement à lui ; ou en Indonésie, un chrétien et un musulman, ex-enfants soldats de communautés religieuses combattantes il y a vingt ans, qui se retrouvent désormais à promouvoir la paix par la culture.
  • Les « German Talks » à l’initiative du média ZEIT Online, ont essaimé dans une trentaine de pays sous l’intitulé « My Country Talks ». Ils proposent de confronter des points de vue opposés sur des sujets de société qui nourrissent les clivages : religions, extrême droite, mariage pour tous, migrations, etc. Avec une idée très simple : faire que les personnes se rencontrent en tête à tête durant une heure, dans un café, hors des écrans et de tout public.

  • Entre autres contenus moins « constructifs », la chaîne Youtube américaine Jubilee a mis en scène des débats et entretiens entre individus totalement opposés sur des sujets de société. Par exemple : Black Conservatives vs White Liberals ; Conservative vs Liberal Gays. Ce format ne permet pas d’aller dans la profondeur des arguments et encourage le pathos, mais il a le mérite de présenter les préjugés de citoyens « ordinaires » et de mettre en lumière la polarisation excessive, parfois injustifiée, ou les possibles voies de réconciliation.

Reporters d’Espoirs

1/02/2019 . Reporters d’Espoirs en dialogue à Lourdes avec la Fédération des médias catholiques

By Agenda, Le Lab, Les articlesNo Comments

Gilles Vanderpooten, directeur de Reporters d’Espoirs, est invité des 23èmes Journées Internationales Saint François de Sales, qui se tiennent à Lourdes les 30 et 31 janvier et 1er février 2019. Il parlera de journalisme constructif aux côtés du journaliste italien Michele Zanzucchi.

Ces journées coordonnées par François Ernenwein, rédacteur en chef et grand reporter à La Croix, est à l’initiative notamment de la Fédération des médias catholiques. Elle est placée cette année sous le signe de « Journalisme et convictions ».

> Découvrir le programme de l’événement

 

À vélo, bus ou auto… Wimoov redonne les clés de la mobilité – La Croix#FRSOL

By FRSOL

La rédaction de se mobilise aux côtés de Reporters d’Espoirs pour mettre en lumière des initiatives porteuses de solutions avec #FRSOL:

À vélo, bus ou auto… Wimoov redonne les clés de la mobilité

Créée il y a quinze ans, l’association Wimoov s’efforce de remettre, physiquement, sur le chemin de l’ ceux qui en sont éloignés.

À Tours, 600 personnes qui ont bénéficié de ce service l’an dernier.

« Liberté, égalité, mobilité. » Le slogan de Wimoov a séduit Cyrielle Cresson. Cette travailleuse sociale a été embauchée il y a un an comme conseillère mobilité à Tours (Indre-et-Loire), dans l’une des seize antennes de cette association nationale, qui venait tout juste d’ouvrir ses locaux.
Extrait de À vélo, bus ou auto… Wimoov redonne les clés de la mobilité | La-Croix.com – En France

La Croix est partenaire de la

Enquête sur les Médias : les Français en quête d'informations constructives !

By Revue de presseNo Comments

Un message aux médias, l’édito de François Ernenwein

Aujourd’hui, l’information sur les médias prend un tour souvent dramatique. Elle se concentre beaucoup sur les évolutions économiques du secteur et sur la formidable adaptation des télévisions, radios, magazines et journaux à la nouvelle donne technologique et à la multiplication des supports. Elle décrit un monde très chahuté, à la fois combatif mais aussi en proie à de profondes mutations. Ces récits parlent d’une part essentielle de la vie des rédactions. Mais ils occultent un peu ce qui fait la richesse de l’activité médiatique : le lien étroit tissé avec des téléspectateurs, des auditeurs, des lecteurs et des internautes.

Le baromètre annuel que La Croix propose depuis plus de vingt ans permet de faire un point utile. Il offre, année après année, une photographie de l’état de l’opinion sur l’information qui leur est proposée, une évaluation de la confiance accordée aux médias. L’intérêt pour les nouvelles se révèle stable. Mais, questionnés à l’approche des rendez-vous électoraux de 2014, les Français, à une nette majorité, comptent beaucoup sur les journalistes pour les informer sur les enjeux des scrutins à venir. Aliments du débat démocratique, les médias doivent évidemment remplir là une fonction pédagogique. C’est en honorant le mieux possible cette demande qu’ils parviendront à corriger des doutes constants, toujours élevés dans l’opinion, sur leur indépendance par rapport aux pouvoirs politiques ou économiques.

Cette ambition, tenter de réduire les incertitudes, première exigence pour les médias, se double d’une autre tout aussi importante : cesser de proposer une vision sombre du monde en ne confondant pas distance critique et sinistrose. Les consommateurs d’information le disent nettement dans ce sondage. Ils souhaitent aussi trouver dans les médias des raisons d’espérer, d’avoir confiance en l’avenir. Ce qui signifie par exemple, pour les journalistes, savoir se montrer plus constructifs.

Face aux défis économiques, ce baromètre n’apporte pas (ce n’est ni son sujet, ni son objet) des réponses toutes faites. Mais il indique des pistes bien utiles pour les journalistes. La sortie par le haut se trouve, à l’évidence, dans la qualité de l’information délivrée.

Intéressées par l’actualité, en quête de repères pédagogiques, les personnes interrogées pour La Croix par TNS Sofres diversifient leurs sources d’information. Las du pessimisme ambiant, les Français souhaitent en outre entendre ou lire davantage de « bonnes nouvelles », constructives et porteuses de sens.

L’opinion sur la façon dont les médias ont restitué l’information progresse sensiblement. La presse, qui enregistre le plus fort regain de confiance (à 55 %, + 6 %), franchit à nouveau la barre des 50 % et supplante la télévision (50 %, + 2 %). La radio reste (à 58 %, + 4 %) le média auquel les Français font le plus confiance. Loin derrière, le Web améliore son image, 37 % des sondés jugeant (comme en 2012) que les choses se sont passées « vraiment ou à peu près comme Internet le montre ». Curieusement, les 25-49 ans (42 %) lui accordent plus de crédibilité que les 18-25 ans (38 %). Le taux de confiance dans Internet atteint jusqu’à 45 % pour ceux qui déclarent avoir comme mode d’information principal « les sites d’information des grands titres ».

 

confiance

 

Pour la première fois, les Français ont été interrogés sur la tonalité du traitement de l’information dans les médias. Le verdict est sans appel ou presque : 61 % déclarent que la presse « fait trop de place aux mauvaises nouvelles ». Et si 6 % seulement estiment que les bonnes nouvelles ont trop de place ! La Croix ne peut que se féliciter de ce résultat, elle qui essaie, encouragée par ses lecteurs, de faire droit dans ses colonnes aux initiatives positives…

 

bonnesnouvelles
L’article complet sur le site de La Croix ICI