Ce lundi 13 octobre s’est tenu au Palais d’Iéna le 5e prix « Reporters d’Espoirs ». Plusieurs distinctions ont été remises à des journalistes dont les interventions peuvent donner envie d’agir. En même temps, cette rencontre a été l’occasion d’annoncer le lancement du Solution MédiaLab, un outil destiné à étudier l’impact des médias sur notre sentiment de pouvoir agir, ou non, sur les événements. Au-delà des contenus, qui peuvent amener par exemple un journaliste a préférer l’image d’un bombardement spectaculaire à celle d’un convoi alimentaire, l’information est en effet aujourd’hui inséparable des technologies numériques qui en modifient profondément la réception, en suscitant trois formes de confusion sans équivalent par le passé.
Une triple confusionLa première de ces confusions est temporelle. Traditionnellement l’information nous arrivait quand nous décidions de lire notre journal ou d’allumer la radio ou la télévision. Mais aujourd’hui, avec les écrans partout présents, l’information nous arrive en tout lieu et à tout moment sans que nous puissions nous y préparer. Nous devenons les otages de l’info.
La seconde confusion provoquée par l’information est spatiale. Traditionnellement, les images des catastrophes étaient saisies par des journalistes qui arrivaient sur place en même temps que les pompiers et les sauveteurs. Nous étions invités à découvrir ensemble la souffrance et la solidarité. Mais aujourd’hui, les images que nous voyons ont très souvent été filmées au téléphone mobile par les protagonistes même du drame. Nous ne sommes plus devant l’action, mais dans l’action.
Enfin, la façon dont l’information nous arrive aujourd’hui provoque une confusion d’intimité. Alors que le travail traditionnel des journalistes relevait d’un regard sur des événements publics, l’utilisation des smartphones et des réseaux sociaux nous plonge dans l’intimité des victimes, et parfois dans celle des agresseurs. Leur intimité fait irruption dans la nôtre.
Ces trois confusions provoquent chez beaucoup d’entre nous une souffrance psychique que je propose d’appeler la fatigue d’impuissance.