
Le mois dernier se tenait la restitution du plan d’action des États Généraux de l’Information au CESE à Paris. 15 propositions et 2 recommandations ont été présentées, adressées aux pouvoirs publics, en vue de soutenir la liberté d’expression et le pluralisme dans les médias. Des mesures concrètes sont proposées dans le rapport : propositions d’abrogation de lois, renforcement de l’éducation aux médias dans le milieu scolaire, éducation du public contre la désinformation, etc. Reporters d’Espoirs se réjouit que la démarche du journalisme de solutions -qu’elle a lancée en 2004 et qui fête cette année ses 20 ans- soit mentionnée à cinq reprises comme une réponse à l’info-anxiété et pour l’innovation éditoriale.
Journalisme de solutions : de quoi parle-t-on ?
Tout simplement d’un journalisme « à spectre large », comme le décrit Serge Michel, ancien directeur de la rédaction du journal Le Monde. En complément des « 5W » – les cinq questions que se pose en général un journaliste lorsqu’il appréhende un nouveau sujet (qui, quoi, où, quand, pourquoi) – il s’agit d’en ajouter une 6e : « qu’est-ce qu’il se passe dans la société, des réponses à ce problème existent-elles ? ». En expliquant, dans la version la plus poussée, à la fois le problème et ses causes, l‘initiative, le processus de résolution qui l’a rendue possible, les résultats obtenus et les limites de l’initiative. Une fierté française ? Cette démarche s’est structurée en France dès 2004, avec Reporters d’Espoirs, avant d’essaimer aux États-Unis, en Europe et dans le monde. |
DÉCERNER DES PRIX POUR SOUTENIR LES DÉMARCHES JOURNALISTIQUES
Le groupe de travail Citoyenneté, information et démocratie soulève à juste titre « La question de la protection de la population, notamment de la jeunesse, contre les excès de l’information (sous l’angle de la santé publique) » et propose que l‘« un des enjeux [soit] de promouvoir le « journalisme de solutions » en ne se limitant pas à soulever les problèmes, le cas échéant en le récompensant par des prix » (page 127 du rapport). En ce sens le Prix Reporters d’Espoirs a depuis 2004 distingué 160 lauréats pour leurs reportages de journalisme de solutions et leurs innovations éditoriales, au cours de 13 éditions saluant des productions écrites, audiovisuelles, des innovations éditoriales des médias régionaux, nationaux, européens et internationaux. Avec le recul, nous confirmons les vertus d’un Prix. Il a permis à des journalistes de défendre leur travail au sein de leur rédaction, de gagner en notoriété auprès du public, de maintenir ou développer leurs rubriques, de convaincre leur média de la pertinence du journalisme de solutions, etc.
RECENSER LA DIVERSITÉ DES SUJETS ET PRODUCTIONS POUR INSPIRER
Le rapport ajoute qu’« en matière de contenu, sans préjudice du principe de liberté éditoriale, la société devrait s’engager à favoriser une diversité dans les sujets abordés, à promouvoir une approche du « journalisme de solutions » ainsi qu’à garantir une représentativité de la population française dans ses intervenants » (page 130). Le journalisme de solutions offre en effet un « spectre large » en ce qu’il permet de compléter l’approche « conventionnelle » en y ajoutant un examen de réponses possibles à des problèmes écologiques, sociaux, économiques ou encore culturels. Le pratiquer, c’est l’opportunité de diversifier et d’enrichir les lignes éditoriales, de donner la parole à des personnes qui agissent sur le terrain, d’analyser et de diffuser la connaissance d’initiatives utiles à la société. Afin de valoriser les réalisations dans le domaine et d’accompagner les journalistes dans leur recherche de sujets et d’initiatives pour les illustrer, Reporters d’Espoirs répertorie au quotidien les productions éditoriales de journalisme de solutions : elle en compte actuellement plus de 7000 référencées dans ses bases (LePlus) et est en mesure d’en analyser la progression média par média.
FORMER ET ÉDUQUER A L’INFORMATION ET SES IMPACTS
Enfin, il estime « souhaitable » « [La] généralisation [du journalisme de solutions], par le biais de la formation initiale des journalistes mais aussi de la formation continue au sein des organes de médias. » (page 160) Pour notamment « Renforcer, dans la formation des journalistes, la sensibilisation aux risques en santé mentale liés au caractère anxiogène de l’information » (page 162). Reporters d’Espoirs en est venu à la même conclusion. Aussi elle intervient tout au long de l’année dans les écoles de journalisme et au sein des rédactions régionales et nationales ; offre un cours en ligne gratuit développé avec l’école de journalisme d’Aix-Marseille (EJCAM) ; propose un catalogue de formations qui l’aborde sous des angles aussi variés que la pratique éditoriale, les opportunités en termes de monétisation des contenus, de recrutement des abonnés, de motivation des équipes, ou encore de lien avec des sujets anxiogènes comme la crise écologique qui appellent à des connaissances scientifiques.
Pour aller plus loin encore, le CLEMI (Éducation nationale) et Reporters d’Espoirs proposent depuis mai 2024 une formation aux enseignants des écoles, collèges et lycées permettant de développer auprès de leurs élèves l’apprentissage des techniques journalistiques et la curiosité pour les initiatives de leur territoire en pratiquant l’interview. Un complément que nous pensons indispensable dans la lutte contre les « fake news », pour offrir un recul critique tout en donnant envie à la jeunesse de s’informer auprès des sources les plus fiables qui soient : celles de qualité et de déontologie journalistiques.
Le journalisme de solutions existe et se structure depuis vingt ans. Le contexte, l’envie des journalistes et des médias d’innover et de répondre aux nouvelles attentes de leurs publics, voire parfois d’accompagner les évolutions de la société, et de préserver la santé mentale des citoyens, ne peuvent que l’amener à se développer. Reporters d’Espoirs remercie les États généraux de l’information de l’encourager et tient son expertise de 20 années dans le domaine à la disposition de toutes et tous, en France et en Europe.